Que blanc devienne blanche
Icare transposé
13 €
Un fleuve, une ruine, un arbre. Il est assez de trois éléments pour rappeler la blancheur d’un été dont rien ne dissout l’aveuglante lumière. Pas même les encres brouillonnes. Lorsque la chaleur atteint son intensité la plus élevée, lorsque la vérité se fait un chemin jusqu’au cœur, le fer blanc révèle son emprise. Lorsque l’apaisement se fait, plus rien ne saurait déchirer la page. Elle est devenue blanche : non pas de ce blanc que l’on dit d’un silence gênant, mais de cette blancheur du lieu fécond, cette épaisseur qu’un noir de jais a rendue féminine. Je ne saurais dire autrement l’écriture.
Mise en bouche
Les premiers envahissements du monde
Il est des jours où le ciel se noie dans l’abondance du soleil. La lumière qui d’habitude rendait les choses visibles les occulte et s’empare entièrement de l’œil. On dit que c’est d’un éblouissement semblable que sont faites les blanches toiles des peintres.
J’ai vécu ces premières possessions à l’âge de l’enfance. Un feu avait pris naissance au fond de mon jardin, et depuis l’ombre fraîche du couloir en pierre, je le sentais venir habiter l’endroit secret d’où je découvrais le monde.
Puis ce fut cette fille, les cheveux mouillés d’un long peignoir gonflé sous les parfums, qui embauma ma jeune chambre. Dans l’instant où elle s’assit en souriant, je sus que tous mes gestes étaient désormais rivés à la nécessité de lui plaire.
La tension qui me noua la gorge un soir d’été où je perçus derrière l’arbre tordu l’intensité de sa position face aux choses.
La ronde danse des épaules, qui sont les premiers à découvrir la chaleur et à s’en émouvoir. Matinalement.
Recouvrement des couvertures : c’est le geste réflexe qui saisit ce frisson. C’est aussi le dernier geste qui annonce et achève le poème submergé.